
Centre thermal, massage par une kiné
Je fais actuellement une cure thermale dans un super centre. Je l’ai choisi car c’est une petite unité qui a la réputation de sa qualité humaine. Ce n’est pas une « usine » avec des soins très bien faits. Et c’est vrai : Un personnel souriant, bienveillant et compétent. Je le vérifie tous les jours car je m’informe, pose des questions et fais des commentaires. Rien à dire, sauf… le massage par une kiné.
J’ai un massage tous les jours.
Premier jour, surprise : très court et uniquement un effleurage sur le dos.
Très honnêtement, une élève dans sa première semaine de CAP, alors qu’elle ne connaît rien, masse mieux que cette kiné. Des effleurages en aller-retour sur le dos, sans pression, qui varient parfois avec des cercles. Un geste mécanique sans une once de présence.
2ejour : je pose la question :
- c’est très court. Combien de temps dure le massage ?
- 10 minutes à partir du moment où vous passez la porte, je déclenche, je vois combien de temps vous mettez pour vous déshabiller donc je déduis car vous allez mettre le même temps pour vous rhabiller et partir. Donc ce qui reste c’est pour le massage.
- Je calcule : Massage de 7 minutes maxi ! soit dit en passant, il n’y a personne avant, ni personne après.
Le lendemain :
- Proposez-vous plusieurs massages ?
- C’est le même mais au lieu de vous masser le dos, je peux vous masser seulement le haut ou bien le bas sur les reins
- Le même massage ? Ben, non faites ça sur tout le dos
Toujours le même ennui. L’impression d’être massé mécaniquement par un robot.
4ejour, à la fin du massage, je me mets debout à côté de la table de massage, je demande gentiment :
- Vous permettez, j’aimerais vous poser une question
- Non! je ne veux pas entendre votre question. Elle me tourne le dos
- Non mais vous inquiétez pas c’est tout simple. Regardez mes genoux
- Non ! je ne veux pas vous regarder, ni vous entendre
- S’il vous plait, c’est juste un avis pas un diagnostic.
- Non madame, je ne veux rien voir ni rien entendre.
- Elle me tourne le dos et démontre qu’en aucun cas elle ne veut me voir
5ejour, excédée par son massage qui ne fait rien et qui même est énervant, je lui dit, toujours avec beaucoup de gentillesse (mais ma pensée doit transpirer la réalité !)
- Qu’est-ce que votre massage est censé me faire ? qu’est-ce que vous sentez de mon dos ?
- Ah moi, je ne sens rien. Ce n’est pas mon rôle. C’est vous qui devez sentir.
- Mais si j’ai des tensions, vous ne travaillez pas du tout sur mes tensions
- Tout le monde a des tensions. Ce n’est pas mon métier. Moi, j’enlève des douleurs.
- J’ai des douleurs.
- Eh bien je les enlève
- Mais je les ai toujours depuis 5 jours.
- Ah bon ? il faut voir avec le médecin.
Ma réflexion : la pauvre ! faire ce travail vide. Qu’est-ce qu’elle doit être malheureuse ! Pas d’affectivité, un travail même pas bien fait. On lui mettrait un mannequin en plastique, ce serait la même chose que moi. Qu’est-ce qu’elle doit être triste quand elle rentre chez elle le soir. Faire un travail mécanique, sans émotion, sans pensée, sans se servir de sa compétence réelle qui est de faire du bien aux gens ! je la plains.
Deuxième réflexion : Pour être massée mécaniquement, je le suis parfaitement dans un centre comme celui-ci. les baignoires hydro-massantes sont parfaites. Les fabricants de matériel ont très bien travaillé. Les buses qui pulsent l’air ou l’eau sont parfaites et massent impeccablement. Et là, pas de frustration.
Je mets de côté la violence que je peux ressentir d’être à ce point niée.
6ejour : je suis toute nue sur la table de massage, elle me lisse le dos mécaniquement sans la moindre présence. Et tout à coup je sens quelque chose de différent à côté. J’ouvre les yeux et à travers le trou de la têtière, j’aperçois des pieds en plus de ceux de la kiné. Je sursaute et me redresse et je vois une femme à côté de moi qui est en train d’échanger des documents avec ma masseuse. Voyant mon air ahuri et ma colère, elle dit « je devais lui donner son planning ! » et elle continue, cette fois-ci officiellement, à discuter avec ma masseuse qui continue à me masser d’une main pendant qu’elle tient le planning de l’autre et le lit !
On est bien peu de chose. C’est vraiment la négation de l’humain.
Réflexion globale : Quand je pense à quel point les kinés nous ont poursuivis, nous les « masseurs de bien-être ». Ils devaient être seuls à avoir le droit de masser et à utiliser le mot massage.
Il ne sont pas tous comme ma kiné, mais quand même.
Quand je me souviens comment nous nous sommes battus pour que dans les Spas nous ayons le droit de dire que nous faisions des massages !
Nous faisions des réunions avec la FFMBE, avec le Dr Horeau, alors président de Spa-A, Joël Stavatowski était attaqué et en procès, avec le Dr Lambolley, Samir Saliba, Isabelle Trombert venait d’ouvrir son école « Ahimsa massage de bien-être », à St Etienne. Nous avons tissé la reconnaissance peu à peu. Le public a tout de suite compris qu’il ne s’agissait pas de la même chose. Il y avait le Spa d’un côté et les kinés de l’autre. Les deux pouvaient cohabiter pour des clients qui choisissaient. La législation a mis des années à valider l’autorisation de l’usage du mot massage pour les praticiens de Spa.
- Fin de mon histoire de massage avec la kiné. J’ai beau vouloir respecter les gens et ne pas les humilier dans un travail qui leur est peut être imposé, il n’y a pas de raison que je ne me respecte pas moi-même et continue à me faire souffrir. J’ai demandé à changer de kiné sans donner aucune explication. On m’a attribué une très jeune femme qui s’est révélée impeccable avec les mêmes contraintes de temps et de type de massage. J’avais des vraies mains reliées à une sensibilité qui me touchaient et me faisaient grand bien. OUF !